Thomas Guilmet
- 3 févr. 2020
- 4 min de lecture

Inventer le développement économique 2.0 sur les territoires

Dernière mise à jour : 12 févr.

« Le développement économique au sein des collectivités doit évoluer au même rythme que les pratiques des entreprises. »

Le développement économique n’échappe pas à la règle de la modernisation, ou plutôt à l’évolution des pratiques et des habitudes des citoyens et des entreprises. Nous ne pouvons plus faire du développement économique comme il y a vingt ans. Trop souvent restreints à la création et à la gestion des zones d’activités, les services de développement économique délaissent l’accompagnement généraliste des entreprises (aides, conseils, orientation, mise en relation…) se déchargeant sur les chambres consulaires (C.C.I. et chambres de métiers) et les associations spécialisées. Outre le fait que cette stratégie conduit inéluctablement vers une incompréhension et un manque de lisibilité, elle nuit à l’image d’efficacité de la collectivité et des agents du service de développement économique.

Mais ceci relève de plusieurs facteurs. Tout d’abord le manque de connaissances et de compétences au sein des services économiques en matière d’accompagnement des entreprises. Puis leur manque de reconnaissance et de crédibilité. Et enfin la difficulté à prendre en charge des missions déjà pourvues par d’autres acteurs, sans créer une rivalité et de l’animosité contre-productive.

Ainsi, depuis bien longtemps les territoires cherchent à créer de la cohérence et de la coordination sans jamais réellement y arriver. La recherche d’un « guichet unique » à destination des entreprises, capable de prendre en compte leurs demandes et totalement identifié, est une véritable chimère. Car chaque structure d’accompagnement défend son pré carré, et protège ses intérêts, même si cela aboutit inévitablement à un manque d’efficacité auprès des entreprises.

Mais qui sont les entreprises qui perdent le plus à ce manque de cohérence, de coordination et de lisibilité ? Certainement pas les grands groupes et les P.M.E. qui sont dotés de suffisamment de ressources pour développer des contacts privilégiés avec les organismes d’accompagnement et trouver les aides adaptées. Les entreprises déjà référencées et présentes dans les réseaux locaux, non plus. Les principaux perdants sont en réalité les très petites entreprises, jamais visitées sur le terrain par les chargés de mission et disposant de peu de temps et de moyens. Ce que nous pouvons appeler la masse invisible des entreprises, pas touchées, pas contactées et pas visitées, et donc pas informées. Cette « masse invisible » représente 93 % des entreprises sur les territoires et une force économique majeure.

Alors, la question se pose de savoir comment en 2020, à l’heure d’internet et de la surinformation, on n’est pas en mesure de fournir un premier niveau d’information adapté et pertinent à ces acteurs du territoire.

C’est tout le sens de la vision 2.0 du développement économique. Chercher à informer et créer un guichet internet affecté au premier niveau d’information et de prise de contact. Afin de faire tomber cette discrimination non voulue, mais réelle, entre le service fourni aux grandes entreprises et celle des T.P.E. Les nouvelles technologies permettent de plus de gommer les inégalités territoriales et fournir un accès d’information identique où que se trouve l’entreprise sur le territoire.

Cela passe tout d’abord par la prise de conscience au sein des collectivités pour développer une réelle stratégie de communication et numérique. Et ainsi de basculer dans la mise en place de services modernes et innovants, bien plus structurants que les simples pages internet fournissant de l’information descendante et statique.

Le développement économique 2.0 afin d’être efficace doit néanmoins être pensé et accompagné d’un véritable changement de mentalité au sein des services : qui ne fonctionne non plus en mode « curatif » (attendre qu’on frappe à la porte), mais en mode « service aux entreprises ».

Le service développement économique à travers la mise en place d’outils adaptés pourra donc être repéré et fléché comme la porte d’entrée en matière de besoin des entreprises, assurant ainsi la reconnaissance d’un service territorial de proximité pertinent et efficace. Tout ceci sans pour autant empiéter sur les divers organismes présents et spécialisés, mais en touchant au contraire des entreprises qui auparavant étaient totalement exclues de l’information et des radars.

En 2017 a été mise en place la première plateforme internet territoriale à destination des entreprises en Pays de la Loire. Cette initiative visait donc à créer un « guichet » non pas unique, mais bel et bien identifié pour assurer un premier niveau d’information (conseil, information sur les aides, réorientation…) auprès des entreprises non accompagnées et visitées. Recenser les besoins et les attentes des entreprises et y répondre, soit par des outils en ligne sur le site (fiches actions, diagnostic, mise en relation, messagerie instantanée…), soit par une prise de contact avec un chargé de mission. Autrement dit, un véritable service aux entreprises sans discrimination de taille, de secteur d’activité.

Un service économique 2.0, capable à la fois de traiter chaque entreprise de la même manière et avec le même niveau de service et de gommer les inégalités d’accès à l’information dues à la taille de l’entreprise, sa situation géographique, son isolement vis-à-vis des différents réseaux. Plus de clientélisme, une meilleure information et prise en charge, avec une plus grande réactivité.